L’erreur de trop – La promotion

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F et moi avons pour la première fois mangé en silence. Mon cher ami affiche une mine de chien battu ce que je ne lui avais jamais vu auparavant. Je ne peux pas croire que ce soit l’idée de moi obtenant une promotion qui le chagrine à ce point.

Je donne mes restes à Poppy et me rends dans la cuisine pour faire la vaisselle. F me suit ruminant toujours comme un boeuf dans une prairie.

– Cela suffit F ! Pourquoi est ce que tu ne veux pas que j’accepte cette promotion ?
– Je n’aime pas la manière dont ce monsieur t’a abordé. Je trouve que c’est un opportuniste.
– Je suis désolée mais il avait déjà en tête l’idée de m’aborder donc sérieusement l’opportunisme, je ne le vois pas. Tu fais tout un foin de pas grand chose en fait. Tu devrais être heureux que j’ai une promotion donc une augmentation.
– Je sais, mais je ne me sens pas à l’aise, j’ai l’impression que quelque chose cloche.
– Moi, je pense que rien ne cloche et maintenant on devrait se mettre au lit si on veut avoir bonne mine demain. Allez, bonne nuit F.

Mon cher ami, s’approche de moi et me pose un baiser sur le front avant de sortir de la maison. Je ferme toutes mes portes, fais les vérifications d’usage avant d’aller me coucher Poppy sur mes talons.

Au travail le lendemain, je suis surprise de découvrir que toute la boite est au courant du fait que le directeur financier m’a déposé chez moi la veille. Une fois à mon poste, ma collègue caissière se jette carrément sur moi avec un large sourire.
E est plus ancienne que moi dans la boite et aussi plus âgée. Malgré sa quarantaine révolue, elle reste un grand enfant avide de ragots. Elle pose son large popotin coincé dans une robe Nanawax qui menace de craquer à tout instant sur un des sièges de mon poste et me regarde d’un air pas très appréciable.

– Alors ma belle, il parait que monsieur D t’a déposé chez toi hier…tu lui as donné un café pour le remercier ?
– Non, je suis juste descendue et je suis rentrée chez moi.
– À d’autres !
– Tu peux croire ce que tu veux, j’ai fini de parler et là, je bosse.
– Tu me demandes de sortir ?
– Je dis que je suis en train de bosser là. Je ne peux donc pas nourrir ta soif de ragots.

E me regarde d’un air outragé et sort en claquant la porte. Je sais qu’elle ne va pas hésiter à me casser du sucre sur le dos. Je décide à la pause, de me rendre au bureau de monsieur D et de lui annoncer que je suis partante pour le post. Avec tous ces discours il faut bien que cela me bénéficie.
Un peu avant la pose, je reçois un autre message de mon correspondant internet.

– Salut douce demoiselle…

Je trouve le message trop familier. Je n’aime pas. Je décide donc de le bloquer surtout que bientôt j’aurai du travail par dessus la tête.
La pause arrive enfin et je traverse rapidement les couloirs de l’entreprise pour me retrouver dans le bureau de Monsieur D. Le poste d’assistante est vide et n’attend que moi. Je tape timidement à sa porte et je suis charmée de le voir se lever venir m’ouvrir.

– J’espère que je ne dérange pas Monsieur D.
– Bien sur que non, entrez et installez-vous.
J’entre et m’installe. Il reprend sa place après avoir refermé la porte.
– Je suis venue pour donner ma réponse.
– Avec un jour d’avance, vous ne sembliez pourtant pas très enthousiaste hier.
– En effet, mais la nuit portant conseil, j’ai décidé de me lancer.
– J’en suis ravie, j’ai préparé une fiche de tache afin que vous puissiez vous familiariser avec votre nouvel emploi. Je vais communiquer l’information aux ressources humaines et je pense que vous pourrez occuper votre nouveau poste la semaine prochaine. Derrière la fiche il y a votre nouveau salaire. J’espère qu’il vous sied.

Je retourne la fiche et manque de m’étouffer. Je serre les points pour garder mon sang froid et paraitre détachée face à cet important salaire.

– Il me sied Monsieur D, merci. Et maintenant, je retourne à mon poste. Passez une excellente fin de journée et encore merci pour cette chance que vous me donnez.

Il me raccompagne à la porte et jusqu’à l’ascenseur, je contrôle mon envie de sauter de joie. Dans l’ascenseur je me lâche et je hurle comme une folle. Je passe par les bureaux vides à l’heure de la pause pour rejoindre le mien où je peux enfin souffler. La fiche de tâche est là sous mes yeux et franchement, il n’y a rien d’effrayant à par peut être les voyages mais je suppose que cela fait partie des activités des assistantes.
Je prends mon téléphone et compose le numéro de ma tante.
Tata A est celle qui m’a élevé après le décès de mes parents dans un accident de voiture. Elle a toujours été la pour moi et est devenue ma maman. Elle décroche assez vite et le fait d’entendre sa voix enjouée me fait le plus grand bien.

– Comment vas tu mon enfant ?
– Je vais bien maman, et toi ? Tu arrives à gérer ton arthrite ?
– Oui ça va. Je sens dans ta voix que tu as une bonne nouvelle à m’annoncer. Tu as enfin un petit ami ?

Pour Tata A, avoir un homme dans sa vie compte le plus. Elle souhaite que je vive heureuse avec un homme comme elle avec son époux. Tonton A est un homme adorable qui considère ma tante comme le diamant le plus exceptionnel au monde. Même si, ils n’ont pas eu d’enfants, ils s’aiment énormément.

– Non maman, pas de petit ami, mais j’ai eu une promotion. C’est une bonne nouvelle en effet tu as l’oreille.
– C’est merveilleux ! je suis heureuse pour toi même si l’annonce d’un petit ami aurait été une bien meilleure nouvelle, celle-ci me ravie. Tu devrais passer ce soir à la maison pour qu’on célèbre cela avec un diner. Viens avec F. Cela fait longtemps que je ne l’ai pas vu.
– Ok tata, embrasse tonton pour moi.
– Ce vieux bougre est en train de dormir devant la télévision comme d’habitude. Je lui ferai la commission.

L’appel terminé, je me remets au travail. A 10 mn de la fin, je range mes affaires et me rends au bureau de F. Ce dernier à sa mine des mauvais jours. Il s’apprête également à rentrer.

– Coucou, on est invité chez maman pour diner donc on y va directement.

F ne me réponds pas mais me traine presque jusqu’à l’ascenseur. Il me fait mal au poignet. Les portes fermés il bloque la boite de fer et me balance au visage :

– Je sais pour la promotion !
– Et ?
– Et je ne suis pas d’accord ! tu vas retirer ta parole demain !
– F, je ne te comprends pas tu connais monsieur D, tu as eu des soucis avec lui ?
– Je ne veux pas que tu prennes ce post.
– Tu vois ce salaire sur cette feuille ? Tu veux que je dise non à cela ?
– Oui !
– Mais donne moi de bonnes raisons au moins. Dis moi ce que je ne sais pas !

F me regarde exaspéré et réactive l’ascenseur. Il ne me dit ensuite plus rien. Même durant le trajet jusque chez maman, il reste silencieux. Je suis perdue. Qu’est-ce qu’il sait que je ne sais pas ?
Chez maman, il essaye de sourire mais on sent bien que c’est forcé et maman ne tarde pas à nous faire asseoir tandis que le repas fini de mijoter sur le feu.

– Qu’est ce qui se passe F ?
– Rien maman, je suis désolé d’être de si mauvaise compagnie, cela doit être la fatigue.
– Maman, il te raconte des bobards, il ne veut pas que je prenne la promotion et ne me dit pas pourquoi.
– Hum, c’est vrai ça F lance tonton en nous rejoignant à table, nous enveloppant d’effluves de sauvage de Dior.

F regarde en l’air sans répondre. Il commence à m’énerver grave. Je nous excuse et l’entraine dans l’immense jardin de la propriété de mes parents.

– Que tu me snobes moi, cela me va mais papa et maman, là je dis non ! Tu vas ou bien passer à autre chose ou cracher le morceau sinon tu sors d’ici et tu m’évites.

F semble revenir à de meilleurs sentiments. Il me prend les mains avec un air grave et se lance :

– Il y a des rumeurs qui circulent sur le nouveau directeur financier. Apparement, c’est un homme à qui les femmes ne disent pas non.
– Hum, tu es sérieux la ? C’est à dire ? Les femmes ne lui résistent pas ?
– Il les force en fait surtout ses assistantes. Il harcèle, viole et ensuite dédommage.

Ce que F vient de me dire là, me cause un choc. En même temps, si c’était vraiment vrai pourquoi tourner autour du pot ? Je ne veux pas croire à ces bobards.

– Et, d’où tu tires ces informations ?
– Les rumeurs l’ont précédé avant son arrivée mais comme il est un proche du Directeur General, c’est resté à notre niveau.
– Bizarre quand même que les informations qui circulent si vite dans la boite ne soient pas descendues cette fois à notre niveau.
– Tu ne me crois pas ?
– Non, je ne te crois pas et je pense que tu devrais cesser de raconter ce genre de trucs, c’est merdique. Rentres chez toi et évites moi un peu ces temps ci. Merci.

À lire ensuite : L’erreur de trop – L’ascenseur

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Je suis d'abord Ingénieur des industries agro-alimentaire ensuite blogueuse, content writer, écrivain de nouvelles à mes heures perdues, passionnée de cuisine et de tout ce qui s'y rapporte, de musique aussi et enfin de ce qui aurait du passer en premier à savoir la lecture.

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